Avec ses criques turquoise, ses oliviers à perte de vue et ses prix encore accessibles, cette île de Croatie était devenue le nouveau paradis des vacanciers français.
Moins chère que la Corse, moins fréquentée que Santorin, elle cochait toutes les cases.
Mais cet été, l’accueil chaleureux a laissé place à une ambiance bien plus tendue.
Car pour la première fois, des pancartes ont fleuri sur les murs, avec un message qui ne laisse plus place au doute :
« Tourists go home. »
Et parfois, en français : “Rentrez chez vous.”
Que s’est-il passé ?
Une île « parfaite »… devenue victime de son succès
L’île en question, c’est Vis, au large de Split.
Jusqu’en 2010, elle était quasiment inconnue, car utilisée comme base militaire par la Yougoslavie.
Mais depuis l’ouverture au tourisme, et surtout depuis le tournage du film “Mamma Mia 2”, les choses ont changé très vite.
- En 2015 : 42 000 visiteurs sur l’année
- En 2023 : plus de 150 000
- Dont près de 25 000 Français, selon les chiffres du ministère croate du Tourisme
Airbnb, bateaux de plaisance, influenceurs sur les pontons : l’île ne désemplit plus de mai à septembre.
Mais les habitants, eux, ne reconnaissent plus leur quotidien.
« Ce n’est plus chez nous. On vit dans un décor de carte postale pour les autres »
Ana, 63 ans, y est née.
Elle raconte :
“Ma rue est devenue un parking. Le petit marché n’a plus rien de local, tout est calibré pour les touristes. Même le café, que je payais 1,10 € en 2019, est à 3 € aujourd’hui.”
Face à cette pression, certains habitants ont décidé de parler haut et fort.
Leur moyen d’expression : des banderoles faites maison, placardées aux entrées de certaines plages ou ruelles :
- “Tourists, leave our island alone”
- “Stop the invasion”
- “Rentrez chez vous”, visible en juillet dernier dans le quartier de Kut
Une île en surchauffe
Voici quelques chiffres parlants :
| Aspect de la vie locale | 2019 | 2024 |
|---|---|---|
| Prix moyen d’un logement Airbnb (été) | 62 €/nuit | 128 €/nuit |
| Nombre de bateaux accostés/jour | 18 | 54 |
| Résidents permanents sur l’île | 3 000 | 2 700 |
| Commerces traditionnels fermés | 4 | 12 |
Les jeunes partent sur le continent, les loyers explosent, et les commerces “à l’année” cèdent leur place à des bars “Instagram-friendly”.
Et maintenant ?
La municipalité tente de réagir : quota de bateaux par jour, plafonnement des locations dans certaines zones, encouragement à un tourisme “hors saison”.
Mais pour beaucoup, le mal est déjà fait.
Et les touristes français, souvent perçus comme “gentils mais envahissants”, sont au cœur des tensions.
Certains habitants ont même demandé à ce que des campagnes soient lancées “pour dissuader les visiteurs étrangers de venir en été”.
Alors, l’île de Vis va-t-elle devenir un symbole du rejet du tourisme de masse ?
Ou saura-t-elle retrouver l’équilibre entre hospitalité et préservation ?
En tout cas, le message est passé. Et il est clair.
