À deux pas de l’Italie, ce village alpin est resté à l’écart du tourisme… jusqu’à cette année

Nichée dans les Alpes françaises, à moins de 10 kilomètres de la frontière italienne, la petite commune de Chianale-sur-Tinée vivait jusqu’à récemment dans un calme presque intact. Quelques randonneurs, des bergers, des familles originaires du coin… et très peu de visiteurs extérieurs.

Mais cet été 2025, tout a changé. En quelques semaines, ce hameau oublié est devenu une destination tendance, prisée pour son authenticité et sa tranquillité – précisément ce que le tourisme de masse vient souvent bousculer.

Un lieu discret devenu viral

Le point de bascule ? Une vidéo partagée sur Instagram en mai dernier par une influenceuse voyage, montrant les ruelles fleuries, les chalets en pierre et le panorama alpin, vue plongeante sur les sommets du Piémont.

En quelques jours, plus d’un million de vues, des partages en cascade et une avalanche de commentaires : “un coin de paradis”, “le nouveau Saint-Véran”, “impossible que ça existe encore”.

Résultat : en juin, juillet et juillet, l’affluence a triplé par rapport aux années précédentes, selon la mairie.

“C’est allé très vite. Les places de parking ont disparu du jour au lendemain. On a même vu des camping-cars stationner devant l’église”, raconte Lucie, 67 ans, résidente à l’année.

Une pression nouvelle pour un village fragile

Chianale-sur-Tinée ne compte que 110 habitants permanents. Il n’y a ni hôtel, ni station-service, ni supermarché. Le village vit au rythme des saisons, entre potagers, sentiers de montagne et soirées entre voisins.

Mais depuis cet été, les habitudes sont bousculées. Voici ce que les habitants observent :

  • Une surchauffe des sentiers de randonnée, parfois abîmés par des groupes mal préparés
  • Des nuisances sonores dans un lieu jusque-là silencieux
  • Une demande accrue de logements saisonniers, faisant grimper les prix
  • Des incivilités légères mais répétées : pique-niques laissés sur place, chiens non tenus, drônes sans autorisation

“Ce n’est pas le nombre qui gêne, c’est le comportement. Ici, on ne crie pas sur la place du village à minuit. On se salue, on respecte le silence,” souligne André, berger local.

Le maire appelle à la vigilance

Face à ce “succès surprise”, le maire de la commune a publié une lettre ouverte en juillet, appelant les visiteurs à faire preuve de discrétion et de respect.

Il y rappelle que :

  • Le village ne peut pas accueillir des centaines de personnes par jour
  • Certains lieux sont privés ou sacrés et ne doivent pas être traversés sans autorisation
  • La commune ne souhaite ni hôtels, ni bars de plage, ni animations festives

“Chianale n’est pas un produit à consommer. C’est un lieu à comprendre,” conclut la lettre.

Une réunion a également eu lieu avec les résidents pour envisager des mesures préventives : création de parkings à l’entrée, limitation de certaines plateformes de réservation, et information visible à destination des visiteurs.

D’autres villages alpins confrontés au même scénario

Le cas de Chianale n’est pas isolé. Plusieurs villages de montagne autrefois discrets ont connu un afflux soudain de touristes ces dernières années, souvent déclenché par une publication virale.

Voici un tableau comparatif :

VillageDépartementHabitantsChangement récentRéaction locale
Chianale-sur-TinéeAlpes-Maritimes110x3 de visiteurs en un étéAppel au respect, surveillance
Bonneval-sur-ArcSavoie250“Plus beau village” médiatiséLimitation du stationnement
CeillacHautes-Alpes300Rando Instagram célèbreSentiers protégés, quotas étudiés
Saint-VéranHautes-Alpes270Flux constant depuis 2019Logements réglementés

Ce phénomène d’“explosion douce” touche de plus en plus de communes rurales, où les structures d’accueil n’ont pas été pensées pour absorber ce type d’affluence.

Un équilibre à construire

Les habitants ne rejettent pas les visiteurs. Beaucoup reconnaissent que le tourisme apporte aussi de l’activité, parfois même de nouvelles idées.

Mais à condition que cela ne vienne pas effacer l’identité du lieu.

“Ce qu’ils aiment ici, c’est précisément ce qui risque de disparaître si ça continue ainsi. L’herbe haute, le silence, les vrais gens,” résume Lucie.

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